Que se passe-t-il sous terre en hiver?

Partout au Canada, qu’il soit court ou long, l’hiver est une période de repos pour le jardin ou la ferme. La neige recouvre le sol et il fait trop froid pour que les plantes puissent pousser. Mais que se passe-t-il sous la terre? Tout s’est-il arrêté? Pas complètement, mais ça ralentit!

La plupart des micro-organismes qui s’associent aux racines des plantes ont un fonctionnement optimal dans une plage de température de 25-30°C. Lorsque la température se rapproche du point de congélation, le nombre de micro-organismes actifs et le rythme de leur activité ralentissent. Mais il existe généralement d’autres micro-organismes qui sont adaptés aux nouvelles conditions. Ainsi, alors que les organismes primaires – qui sont actifs en été lorsque les plantes poussent – peuvent cesser de fonctionner en hiver, d’autres, telles certaines communautés microbiennes, augmentent leur taux d’activité à mesure que les conditions changent. Par exemple, de nombreux champignons décomposeurs ont une plage de température optimale inférieure à celle des bactéries. Ainsi, alors que les champignons ne se développent généralement pas à pleine capacité pendant l’hiver, lorsque les températures changent au printemps et à l’automne, leur activité dans le sol peut être plus présente. C’est pourquoi le printemps et l’automne sont les meilleures saisons pour repérer les champignons.

La profondeur à laquelle le sol devient gelé, stoppant l’activité microbienne, dépend de nombreux facteurs. Il peut s’agir de quelques centimètres à la surface, ou d’un mètre de profondeur. Néanmoins, sous la couche gelée, la vie est toujours présente. Des créatures telles que les crapauds et les vers de terre produisent leur propre antigel et s’enfouissent en profondeur pour survivre au froid. D’autres pondent des œufs ou fabriquent des spores pour se réveiller et reprendre vie lorsque les conditions sont favorables.

La matière organique et la couverture de neige constituent toutes deux une isolation pour vos sols. Il est avantageux de garder votre sol couvert par des cultures de couverture hivernales ou par des débris végétaux, car cela permet de protéger la vie microbienne d’un gel profond. C’est aussi une bonne idée de prévoir des brise-vents pour retenir la couverture de neige. De plus, la fonte des neiges s’infiltre dans votre sol au printemps. Si votre sol percole bien grâce à une bonne gestion régénératrice, vous stockerez de l’eau en réserve pour vous aider à passer les mois d’été secs et chauds.

 

Trucs du jardin d’Ananda

À l’automne, je plante des cultures de couverture après avoir récolté l’ail, les pommes de terre, les tomates et les cultures sensibles au gel qui sont récoltées plus tôt. Cette année, j’ai utilisé un mélange d’avoine, de pois fourragers et de moutarde. Ceux-ci seront tués par le froid, laissant des débris de plantes au printemps. Dans certaines zones où les cultures ont été récoltées plus tard, j’ai semé du seigle d’automne, qui recommencera à pousser au printemps, ce qui m’obligera à l’étouffer avec une bâche d’occultation (une lourde feuille de plastique noir qui tue les plantes en bloquant la lumière), ou à le retourner avant de pouvoir planter.

Mon jardin fait environ un acre, réparti en plusieurs sections différentes. Il est suffisamment petit pour que je puisse utiliser des paillis de feuilles et de paille pour couvrir le sol. Je récupère les sacs de feuilles que les habitants d’une ville voisine ramassent sur leurs pelouses et je les utilise pour faire du compost et pour couvrir certaines parties de mon jardin. Après avoir planté mon ail, je recouvre les planches de culture de feuilles, puis de paille pourrie pour empêcher les feuilles de s’envoler. Au printemps, ce paillis empêchera les mauvaises herbes de pousser et il sera plein de vers, un lombricompost sur place! Je mets aussi du paillis sur les plates-bandes où j’ai des panais et des poireaux qui seront récoltés au printemps et sur les plates-bandes de fleurs vivaces. J’utilise un épais paillis de copeaux de bois autour des racines de mes arbustes à baies.

Trucs de la ferme d’Alix

La Ferme Larkspur, notre petite exploitation de légumes et de fleurs coupées, est située dans l’ouest du Québec, dans la zone 4A. Nous cultivons et commercialisons nos aliments et nos fleurs jusqu’à la fin du mois d’octobre. Lorsque nous planifions la fin de la saison, deux questions clés guident les actions que nous choisissons de prendre en matière de santé du sol. Comment pouvons-nous nourrir le réseau alimentaire du sol le plus longtemps possible? Si nous n’avons pas de plantes qui poussent, comment pouvons-nous garder le sol couvert pendant l’hiver? En tant qu’exploitation agricole active, les stratégies que nous utilisons changent d’année en année. Les décisions que nous prenons dépendent du calendrier, de la capacité de travail, de la météo et de la rotation des cultures.

L’une des mesures les plus simples que nous prenons est de laisser les résidus de culture en place et de ne pas préparer les planches avant le printemps. Par exemple, nous laissons notre champ de fleurs annuelles intact jusqu’au printemps. Ces plantes ont fait de la photosynthèse pendant des mois et ont développé de grandes tiges épaisses et des racines abondantes. Non seulement ces plantes nourriront l’écosystème microbien du sol jusqu’aux gelées, mais les racines retiendront le sol pendant l’hiver et fourniront de la nourriture et un habitat aux oiseaux et aux insectes.

Lorsque le moment sera propice, nous utiliserons également des cultures de couverture qui seront tuées par le froid de l’hiver, telles l’avoine et les pois, ainsi que le trèfle annuel. Ces cultures s’implantent à l’automne, même en cas de légères gelées, et continueront à nourrir le sol. Nous utilisons également une combinaison de paillis sur nos plates-bandes permanentes, notamment des résidus de culture (par exemple, des fanes de carottes), du compost, de la paille et des bâches noires.

Trucs du jardin urbain collectif de Sara

Les jardins collectifs éducatifs de On sème sont au cœur de la ville. Nous aimons créer des partenariats afin de récupérer au jardin des ressources qui proviennent de l’activité locale. Par exemple, nous recouvrons nos allées et nos forêts nourricières de bois raméal fragmenté provenant des arbres taillés par des émondeurs des quartiers environnants. Cette année, nous avons eu la chance de travailler avec une compagnie qui offre des décorations d’Halloween biologiques et qui les récupèrent afin de redonner ces ressources à des initiatives locales. Nous avons ainsi pu recouvrir plusieurs de nos planches de cultures avec de la paille et des tiges de maïs biologiques. Nos ami·e·s chez Polliflora nous ont aussi appris à laisser certaines plantes enracinées, tels les tournesols, afin que les tiges puissent offrir un abri aux pollinisateurs et autres insectes durant l’hiver. Nous adorons notre brise-vent de saules qui permet d’atténuer les rafales de vent et offre un lieu de rétention pour l’eau au jardin. Finalement, nos ami·e·s chez Régénération Canada nous ont appris que garder les racines en place permet en même temps de maintenir le sol en place, donc de limiter l’érosion, et d’offrir une apport en nourriture pour la vie du sol.

Trucs de la ferme de Meagan

Puisque la Ferme Patch est une ferme d’élevage basée sur les pâturages et que notre bétail vit à l’extérieur toute l’année, il est extrêmement important que nous planifions nos actions très soigneusement – surtout au printemps et à l’automne. La transition de l’automne à l’hiver est une période de fortes précipitations ici dans le sud du Québec. Nous commençons donc à rapprocher le bétail de la maison au début du mois de novembre et le gardons dans un « enclos sacrifice » où nous le nourrissons de foin. Cela permet de réduire au minimum le compactage et le pétrissage, qui résultent généralement du fait de laisser les animaux sur un sol très détrempé. Si la présence de communautés très denses d’herbes à racines profondes peut contribuer à réduire ce type de dommages, ce n’est pas toujours facile à réaliser, selon les conditions écologiques de votre ferme. Notre ferme est nichée dans une petite vallée et comporte beaucoup de terres basses qui ne se drainent pas très bien et qui sont sujettes à des inondations occasionnelles au printemps et à l’automne. Nous devons donc faire très attention à limiter au maximum la circulation – des animaux et des machines – pendant cette période de transition.

Que faisons-nous donc pour protéger le sol pendant l’hiver? Tout d’abord, nous nous assurons de laisser une bonne quantité de résidus dans nos pâturages. J’aime laisser au moins 6 pouces d’herbe sur place. Cela permet d’isoler les plantes et les racines sous la couche de neige, de créer un habitat pour les petites bêtes et de donner aux pâturages un avantage au printemps car il y a plus de feuilles pour capter la lumière du soleil. Et si je planifie bien les choses, je peux même laisser une couche d’herbe de 12 à 16 pouces que le bétail peut brouter pendant l’hiver. Cela ne couvre pas 100% de leurs besoins en fourrage, mais toute quantité aide. Nous aimons aussi faire du pâturage de balles de foin autant que possible pendant l’hiver. Nous donnons du foin dans l’enclos sacrifice jusqu’à ce que le sol soit gelé, puis nous mettons le foin directement dans les champs. C’est bien mieux pour le bétail, qui reste plus propre et plus sec. C’est également meilleur pour le sol car les animaux laissent derrière eux de la matière organique sous forme de fumier, d’urine et de résidus de foin. Il est également beaucoup moins cher et plus efficace d’épandre des balles de foin plutôt que de ramasser le fumier au printemps et de l’épandre sur les champs.

En bref, en utilisant les méthodes appropriées au contexte dans lequel vous cultivez, couvrez votre sol avec amplement de matière organique nourrissante et une bonne couche de protection. Vous pouvez prendre une pause pendant l’hiver et certains des microbes de votre sol en feront autant, mais d’autres se prépareront pour le printemps!