Le Club Action Billon est un groupe d’agriculteurs qui s’entraident pour apprendre à améliorer au mieux la santé de leurs sols. Depuis plus de vingt ans, ils organisent des événements qui rassemblent les agriculteurs pour qu’ils partagent leur expérience et se familiarisent avec les nouvelles innovations. Au début, 20 à 30 agriculteurs se présenteraient à l’un de ces événements d’une journée. Mais dernièrement, le sujet de la santé des sols attire de plus en plus de monde. Cette année, plus de cent personnes ont assisté à l’événement annuel.
Le 16 septembre dernier, Régénération Canada a organisé un atelier d’une journée avec le Club Action Billon à Les Cèdres (Québec), à la Ferme Longprès. La Ferme Longprès est une ferme familiale de 1 500 acres gérée par deux générations de la famille Dewavren. Il s’agit d’une ferme biologique qui cultive diverses grandes cultures avec un labour minimal et des cultures de couverture. Avec un si grand groupe, nous avons dû nous répartir en quatre groupes et circuler entre les différentes présentations. Sur le terrain, les quatre sujets étaient les suivants:
L’intelligence artificielle pour l’agriculture
Quatre sociétés vendant des technologies de données, Hortau, Precision Planting, Karnott et Horoma, étaient présentes pour montrer leurs offres et discuter des avantages. Différents types de capteurs sont capables de collecter des données sur le terrain, telles que l’humidité du sol, la température, le pH, les matières organiques, les niveaux d’azote, les niveaux de phosphore, la densité de la biomasse, etc. Quel est l’avantage? Avoir cette information peut aider les agriculteurs à réduire les intrants, traiter les problèmes avant qu’ils ne deviennent sérieux et avoir un retour plus précis lorsqu’ils essaient de nouvelles choses. Cela permet également aux agriculteurs de travailler ensemble pour partager des données provenant d’un échantillon plus large. Plus les données collectées sont nombreuses, plus elles peuvent être précises et significatives.
Adaptation de l’équipement pour la gestion régénératrice
N’étant pas un garçon qui aime les tracteurs et les machines, j’étais dans la minorité du groupe présent! Je dois donc dire que je n’ai pas pleinement compris toutes les nuances de la présentation. Ce que j’ai bien compris, c’est que les machines agricoles standard ne sont pas adaptées aux agriculteurs novateurs qui utilisent des méthodes de régénération telles que l’absence de labour du sol, la culture en bandes, le labour minimal et les cultures de couverture. De nombreux agriculteurs, y compris la famille Dewavren, sont ingénieux pour adapter les équipements afin de faciliter leurs méthodes. Ils utilisent les tracteurs les plus légers possibles pour éviter la compaction, ce qui annulerait les avantages de la construction du sol. Un de ces jours, les méthodes de régénération susciteront suffisamment d’intérêt pour que la machinerie agricole soit disponible pour que les agriculteurs moins ingénieux puissent obtenir ce dont ils ont besoin.
Diagnostiquer votre sol avec un profil de sol
La merveilleuse Caravane des sols du MAPAQ (Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec) était aux côtés de superstars Odette Ménard et Louis Robert, pour parler des avantages de faire un profil de sol pour comprendre ce dont votre sol a besoin. Un profil de sol consiste à creuser un trou dans le champ d’environ un mètre de profondeur et à regarder ce qui se passe avec les horizons pédologiques. Quelle est la profondeur de la terre arable? Jusqu’où pouvez-vous trouver des racines? Comment sont les agrégats du sol? Et surtout, où est la couche de compactage? Trop d’agronomes pensent qu’un problème de drainage sera résolu en installant des tuyaux de drainage coûteux, alors que le véritable problème est le compactage provoqué par le passage sur un terrain humide avec un équipement lourd. L’un des problèmes les moins bien compris et les plus courants n’est pas le manque d’azote, mais le manque d’oxygène des sols compactés. Pour remédier à ce problème, il suffit de percer des trous profonds et de planter une culture de couverture de moutarde qui s’enfonce rapidement, puis de laisser le champ pendant un an. Les meilleurs rendements proviennent des champs qui utilisent le moins d’équipement et le moins d’intrants.
Gestion biologique des grandes cultures
Tomas Dewavren nous a guidés dans une visite de ses champs. Il n’utilise pas de fumier comme source d’azote, mais tire plutôt tout son azote de ses cultures de couverture et de ses rotations. Les champs sont dans des bandes étroites de 36 mètres et ils effectuent une rotation du maïs, du soja, du blé et des cultures de couverture. Le trèfle est semé entre les rangs de blé et est coupé en juin après la floraison.
Deux autres présentations ont été données à l’ensemble du groupe à l’heure du déjeuner. J’ai présenté la pétition de Régénération Canada demandant aux candidats politiques fédéraux de créer des programmes soutenant l’agriculture régénératrice en tant que solution climatique. Les agriculteurs innovants comme ceux-ci prennent le risque de passer à des méthodes agricoles qui peuvent réellement aider toute la société en éliminant l’excès de carbone de l’atmosphère. Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait les soutenir en créant des programmes les aidant à minimiser les risques liés à la transition et à les compenser pour les services écosystémiques fournis à la société.
Arbre-Évolution a ensuite expliqué comment ils utilisaient des crédits de carbone volontaires pour payer les agriculteurs et qu’ils payaient les agriculteurs pour qu’ils plantent des arbres dans leurs fermes le long des cours d’eau. Les agriculteurs sont payés pour l’équivalent du rendement qu’ils abandonnent pour avoir les arbres sur leurs terres. Ils doivent y laisser les arbres pendant au moins 30 ans et Arbre-Evolution les entretient. Finalement, ils peuvent récolter le bois s’ils le souhaitent.
Les agriculteurs et les consultants pionniers qui assistent à de tels événements ouvrent la voie à la transformation du paradigme de l’agriculture. Ils ouvrent la voie à ceux qui vont suivre et ce sont eux qui prennent des risques. Nous leur devons beaucoup, raison pour laquelle nous croyons que le gouvernement et le reste de la société devraient les soutenir, pour que ce soit plus facile et plus sûr pour ceux qui vont suivre. Mais le chemin n’est pas seulement difficile; c’est aussi enrichissant. Lors d’un événement comme celui-ci, la passion et la camaraderie qui se partagent donnent de l’énergie à tous. C’est ce qui nous fait avancer.
