La communauté rurale qui construit des ponts

Notre-Dame-de-Stanbridge est une parmi plusieurs petites communautés rurales du sud du Québec. À l’instar de nombreux endroits au Canada, la population démographique a beaucoup évolué au cours des dernières décennies pour inclure des citadins et des petites exploitations biologiques ainsi que des exploitations plus conventionnelles.

Rassembler les locaux autour de valeurs écolos
Carole Dansereau est une ancienne institutrice qui a pris sa retraite avec son mari à Notre-Dame-de-Stanbridge. Ouverte et énergique, Carole a rejoint des comités, écrit pour le journal local d’une municipalité voisine et est même devenue conseillère municipale. Elle a défendu les valeurs écologiques et a trouvé des sympathisants locaux.

La Fête dans l’rang: zéro déchet et partenariat avec une petite ferme
Chaque année, dans cette communauté, l’UPA, le syndicat de l’agriculture qui détient le monopole au Québec, parraine un festival d’été dans une ferme locale: La Fête dans l’rang. L’année dernière, sous l’influence de Carole sur le comité d’organisation, la ferme locale choisie était une nouvelle fromagerie de chèvre, une petite entreprise écologique. Les politiques de l’UPA ne répondent pas aux besoins des petites fermes biologiques et il s’agit d’une source de tension constante. Le choix de cette ferme était donc surprenant! Le groupe a également choisi de rendre l’événement zéro déchet et d’utiliser des toilettes à compostage au lieu de toilettes chimiques. La Fête dans l’rang a été un succès et a ouvert les cœurs et les esprits.

La Journée citoyenne sur l’écoresponsabilité
Encouragée par l’expérience, Carole a décidé d’organiser un autre événement local, la Journée citoyenne sur l’écoresponsabilité, qui s’est déroulée en mars. Au nom de Régénération Canada, j’ai été invité à présenter un exposé sur l’agriculture régénératrice. Antonious Petro, également de Régénération Canada, a animé les débats. Des agronomes locaux ont présenté des exposés sur l’agriculture sans labour et les cultures de couverture, l’intégration de la biodiversité et de l’habitat pour les espèces utiles dans les exploitations agricoles, le rôle des vers de terre. Quelques agriculteurs biologiques ont présenté leurs méthodes et deux entreprises locales, une épicerie zéro déchet et une coopérative de distribution alimentaire, ont apporté l’aspect consommateur de l’équation. Un tiers des participants étaient des agriculteurs. Plus de 80 personnes de Notre-Dame-de-Stanbridge et des municipalités environnantes étaient présentes.

Faciliter la conversation entre consommateurs et agriculteurs
C’était touchant de voir les échanges entre consommateurs et agriculteurs. Trop souvent, les consommateurs qui veulent des choix plus écologiques blâment les agriculteurs sans comprendre ce à quoi ils sont confrontés. Une jeune agricultrice a raconté comment elle avait essayé d’accroître la biodiversité des cultures de sa ferme, mais qu’elle était bloquée par du tournesol et du lin qu’elle ne pouvait pas vendre. Elle se sentait sur la défensive de ne pas pouvoir répondre aux attentes des consommateurs, mais le problème est systémique. Les agriculteurs doivent pouvoir vendre leurs produits et s’il n’existe aucun système de distribution, ils ne peuvent pas se permettre de faire des choix uniquement pour des raisons écologiques.

Le début d’une politique plus favorable pour les petits producteurs?
Si les consommateurs veulent des aliments contenant moins de pesticides, ils doivent également être disposés à acheter des fruits et des légumes imparfaits. Beaucoup ont remarqué à quel point il était inhabituel et intéressant d’avoir une telle conversation entre agriculteurs et consommateurs. Cela a aidé tout le monde à comprendre le visage humain des différentes positions et à comprendre que si nous voulons un changement, nous devons travailler ensemble. L’un des producteurs de légumes biologiques a annoncé que l’UPA organiserait une visite dans sa ferme ce printemps. Est-ce le début d’une politique plus flexible et favorable pour les petits agriculteurs écologiques?

Espérons que ce processus de construction de ponts entre des groupes de personnes qui normalement ne se parlent pas se développera pour créer de meilleurs systèmes qui répondent aux besoins des agriculteurs, des consommateurs et de la planète. En commençant par de petites connexions locales et très personnelles, de petits miracles à taille humaine peuvent se produire.